Le documentariste David Kaufman a fait une recherche intitulée The Jewish Community in the Plateau Mont Royal. M. Kaufman nous apprend que la pléthore de synagogues qui avaient poussé comme des champignons au cours de la première moitié du XXe siècle ne correspondait pas du tout à la croissance de la population juive ultraorthoxe. À tel point que plusieurs de ces synagogues ne parvenaient pas à former le quorum de dix hommes qui était nécessaire à la célébration des prières publiques. Pourquoi nous faudrait-il croire aujourd’hui un Alex Werzberger qui nous raconte que leurs pratiquants étouffent dans leurs lieux de culte et qu’il faudrait leur permettre d’ouvrir davantage de synagogues dans les rues résidentielles de l’arrondissement? Le maire Jérôme Choquette avait très bien compris pourquoi. Il l’avait d’ailleurs expliqué très clairement dans un article paru dans La Presse du 14 septembre 1988 : « Le problème, c’est que les Juifs préfèrent les rues résidentielles qui sont plus propices aux activités religieuses ». Le maire Choquette leur rétorquait toutefois qu’ils avaient déjà des synagogues dans les rues commerciales et que cela ne leur causait pas de problèmes particuliers.
C’est sûr que lorsque l‘on veut faire des processions impromptues à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit comme cela s’est produit plusieurs fois ces dernières semaines, c’est plus facile de réveiller les résidants du quartier que de faire bloquer la circulation des artères commerciales. Et puis, dans les rues résidentielles, on peut se stationner en double à qui mieux mieux! (voir vidéo tourné le 8 juin 2008, rue Jeanne-Mance)
Avec des générations d'autorités municipales qui ont systématiquement fait preuve de mollesse chronique, on ne s'étonne donc pas de constater que plusieurs résidences ont été transformées en synagogue au fil des ans. Nos élus ont favorisé la formation d'un super ghetto intégriste en plein cœur de quartiers résidentiels jadis paisibles et harmonieux.
Afin de vous donner une bonne idée de la situation actuelle dans le quadrilatère formé par les rues Fairmount, Hutchison, Bernard et Jeanne-Mance, nous vous avons préparé une petite carte des synagogues qui y ont pignon sur rue. Cliquer sur la photo numérotée de 1 à 12, ci-haut. Pas moins de 12 synagogues y sont déjà en activité.
Alors, dites-nous. Des synagogues, vous en voulez encore combien de douzaines dans vos rues résidentielles? Il faut se poser la question, car nos élus municipaux semblent très réticents à mettre leur pied à terre et à faire respecter le zonage. Faudrait pas faire de la grosse "pepeine" aux illégaux, n'est-ce pas?
Vous vous pensez à l'abri sur votre rue? Avez-vous la moindre idée du nombre de nouvelles synagogues qui risquent d'être implantées près de chez vous au cours des prochaines années? Avec le laisser-faire des autorités des arrondissements d'Outremont et du Plateau, et l'étude de 2005 sur l'évaluation des besoins et sur les projections des ultraorthodoxes de Montréal dont nous avons obtenu copie, les oreilles pourraient bien vous friser!
Voici la petite histoire des synagogues dans ce quadrilatère (ou en bordure): 1) Synagogue Belza
L’ancien duplex du 5565 Jeanne-Mance a été transformé en synagogue il y a déjà longtemps. Elle peut recevoir 200 hommes assis au rez-de-chaussée et 90 femmes à l’étage. En 2006, la congrégation qui l’utilisait l’a vendue à la communauté Belz. Un coup parti, on a ouvert une école hassidique juste à côté.
Récemment, les autorités municipales ont donné le feu vert à la construction d'une garderie au sous-sol de la synagogue. Ils ont creusé, creusé et creusé. Si bien qu'encore aujourd'hui, la ruelle derrière la synagogue n'a pas été repavée. Avaient-ils le droit, en vertu du zonage de faire de tels travaux? Certains citoyens du coin sont en train de faire les vérifications. Nous y reviendrons.
2) Synagogue Belzer Bais Hamedrash et Chaside Belz
5336 à 5344 Jeanne-Mance
En dépit des nombreuses plaintes des résidants, d'un avis défavorable de la part de la Commission de développement urbain et aussi du Service de développement économique et urbain de la ville qui s'opposaient à l'agrandissement de la synagogue, les représentations faites pas M. Saulie Zajdel, ancien porte-parole de la Congrégation Belz devenu responsable de l'urbanisme au Comité exécutif de la Ville (!!!) ont porté fruit. La synagogue s'est propagée à cinq duplex de la rue résidentielle avec les inconvénients que l'on sait. Pour lire l'article publié à l'époque, rendez-vous à la page 15 du mémoire que nous avons présenté à la Commission Bouchard Taylor.
3) Fédération nationale ukrainienne*
5213 Hutchison
L’ancienne église méthodiste avait été convertie en synagogue au cours du XXe siècle avant d’être reprise par la Fédération nationale ukrainienne qui loue le local comme centre communautaire, salle de théâtre et pour des événements sociaux.
Ces derniers temps, des rassemblements hassidiques s’y tiennent. Il est assez évident que la communauté hassidique a un œil sur l’édifice qu’elle ne détesterait sûrement pas reconvertir en synagogue. Si cela devait s’avérer, à lui seul, le pâté de rue Hutchison (entre Fairmount et Saint-Viateur) se retrouverait avec pas moins de quatre synagogues. On ne veut même pas imaginer l’achalandage et le chaos que cela engendrerait au niveau de la circulation. De plus, à plus ou moins court terme, cela pourrait signifier la fin de la Croissanterie que certains hassidim qualifient de lieu de perdition. Les dirigeants hassidiques pourraient très bien faire une offre au propriétaire de l'immeuble qui abrite la Croissanterie, puis évincer le propriétaire du café qui loue le local. Bonjour l'ambiance de quartier une fois cela fait!
4) First Mesifta Hutchison Branch
5253, Hutchison
Il s’agit d’une des synagogues qui donnent de fabuleux maux de tête aux autorités municipales. Elle a beaucoup fait parler d’elle au cours des dernières années et des derniers mois en raison des nombreux travaux exécutés au mépris des lois et règlements municipaux. C’est également ici qu’il y a deux semaines, le célébrissime Michael Rosenberg a fait couper illégalement un arbre d’une quarantaine d’années. Les démêlés juridiques sont loin d’être terminés dans ce cas qui oppose la congrégation à l’arrondissement du Plateau. Une lutte à suivre.
5) Gate David of Bobov*
5363 Hutchison
Comme bien d’autres synagogues du coin, tout ne se serait pas fait de façon harmonieuse et limpide avec les autorités municipales. On s'apprête même à permettre l'agrandissement de cette synagogue en demandant une dérogation car le zonage actuel ne permet pas de construire au-delà de la superficie du terrain déjà occupée par l'édifice. Encore un accroissement de nuisance en vue.
6) Munkatch*
1030 St-Viateur Ouest
Depuis 26 ans, cet ancien duplex est une synagogue illégale qui a pignon sur rue en pleine zone résidentielle. Le fait est connu des autorités d’Outremont qui ont « négligé » de la cadenasser. Une autre épine au pied de la mairesse d’Outremont qui semble bien coincée entre le reportage de Radio-Canada diffusée le 26 mai dernier et le lobby hassidique qui la soumet à une intense pression.
7) L’église presbytérienne chinoise
5560-5566 rue Hutchison
Voici un autre bel immeuble sur lequel la communauté hassidique aimerait sûrement mettre la main pour "accommoder la population hassidique" qui, selon ses dirigeants, pourrait bien constituer 35 % de la population de l’arrondissement d’Outremont d’ici 20 ans.
8) Yetev Lev - Satmar*
5555 Hutchison
La grosse synagogue qui s’élève au coin de Saint-Viateur et Hutchison est une ancienne maison de chambres qui a été convertie en synagogue au début des années 1980. Le duplex juste au nord de cette synagogue a bénéficié d’une dérogation pour être transformé en dortoir pour les étudiants religieux provenant en bonne partie de la communauté Satmar de New York. Le duplex suivant (5569-5571 Hutchison) a, lui, été transformé illégalement en dortoir en dépit d’une interdiction formelle des autorités municipales en 2004. Les autorités viennent de se rendre compte que les dirigeants hassidiques avaient tout simplement fait fi de cette interdiction. Encore de belles années de litige en perspective. On parie sur qui gagnera cette énième bataille?
9) Machzikei Torah of Montréal*
1075 Bernard Ouest
Si vous déambulez sur la rue Bernard, vous aurez sûrement remarqué sa belle façade de brique et de lattes de bois brun, ses néons blafards, ses minuscules fenêtres givrées, etc. On voit parfois le célèbre Alex Werzberger entrer et sortir de cette synagogue au couloir déprimant.
10) Imray Chaim of Wiznitz*
5843 Hutchison
Une autre synagogue particulièrement déprimante et délabrée sur la rue Hutchison.
11) La Mère Poule
Au coin des rues Hutchison et Bernard, le restaurant La Mère Poule ne nous fait plus d’œufs le matin. Il a été acheté par la communauté hassidique il y a quelques mois. Ses dirigeants ne veulent pas admettre qu’ils souhaitent en faire une énième synagogue.
Un des problèmes qui se posent ici réside dans le fait que du côté outremontais de la rue, le zonage ne permet pas l’établissement d’une synagogue alors que du côté de Montréal, cela n’est pas interdit. Voici un bel exemple d’une harmonisation plus que souhaitable entre deux arrondissements. En attendant, regardez bien ce qui va se passer. C’est pratiquement écrit dans le ciel!
12) Maor Hagola*
5815 Jeanne-Mance
Plus déprimant et délabré que ça, il faut se rendre dans le tiers-monde. Les fenêtres de la façade de l’immeuble sont tapissées de papier (ou de peinture écaillée?). C’est d’un chic fou! Et ça vous revalorise un environnement comme ce n'est pas possible.
* http://www.rabbinat.qc.ca/nsite/synagog.htm#MTL_OUTRE
Tous les lieux de culte énumérés ci-haut n’incluent pas certaines synagogues qui sont toujours annoncées sur des sites Web de la communauté juive. En voici quelques exemples :
— la synagogue Tosh Montreal, 5427 rue Jeanne-Mance (http://www.godaven.com/browseminyan.asp?City=Montreal)
— la synagogue Toldos Yaacov Yoseph — Skver, 6019 Durocher (http://www.rabbinat.qc.ca/nsite/synagog.htm)
— la synagogue Beth Israël Damesek Eliezer, 285 Querbes (http://www.rabbinat.qc.ca/nsite/synagog.htm#MTL_OUTRE)