mercredi 31 août 2016

PROCESSUS RÉFÉRENDAIRE - TOUT CE QUE VOUS DEVEZ SAVOIR



Il y a près de deux ans, Mme Marie Cinq-Mars, la mairesse d’Outremont, annonçait que l’arrondissement allait entreprendre une révision de son règlement encadrant la question des activités religieuses sur les artères commerciales.

Tout comme les commerçants et de nombreux résidents des environs des avenues Laurier et Bernard, le conseil de l’arrondissement s’inquiétait pour la vitalité de ces rues à vocation commerciale. Pour tenter d’inverser la désaffection des commerces de proximité, différentes approches sont alors envisagées, dont celle de limiter la multiplication des lieux de culte sur ces artères marchandes.



Une nouvelle fermeture de boutique sur Bernard. La propriétaire qui est également présidente de l’Association des Marchands de l’avenue Bernard se plaignait, entre autres, du maigre achalandage. (source: Le Journal d'Outremont)

À cette fin, les élus municipaux ont récemment voté à la majorité un règlement qui limite tout nouveau lieu de culte sur les avenues Bernard et Laurier. Pour entrer en vigueur, cependant, ce règlement doit d'abord être soumis à l’approbation des citoyens habiles à se prononcer.

En discutant avec des résidents du quartier, force a été de constater qu’un bon nombre d’entre eux sont peu familiers avec le mécanisme référendaire.


Avant d’en expliquer les grandes lignes, une chose doit être bien claire: Si vous ne souhaitez pas que de nouveaux lieux de culte soient ouverts sur Bernard et Laurier, n’allez pas signer le registre qui sera accessible le 8 septembre prochain. Seuls ceux qui veulent voir plus de lieux de culte s'y développer auront intérêt à se déplacer pour signer ce fameux registre.

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Petit bréviaire de chevet
en 10 questions/réponses
pour comprendre les rouages
d'un processus référendaire
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Q 1: Qui souhaite la tenue d’un référendum pour débattre la question de l’ouverture de nouveaux lieux de culte sur les avenues commerciales Bernard et Laurier?  

R : Ce sont les communautés religieuses et leurs fidèles, qui veulent recourir au processus référendaire. Leur but sera de s’assurer qu’elles pourront multiplier leurs lieux de culte sur ces deux rues destinées au commerce.

Q 2
: Les commerçants qui y exploitent une place d’affaires et les citoyens qui habitent dans un certain rayon autour de ces avenues ont-ils intérêt à ce que le règlement de zonage voté par les élus d’Outremont soit battu à la suite d’un processus référendaire?

R : Non. La plupart des commerçants et des résidents n’ont pas intérêt à ce que des lieux de culte empiètent davantage sur ces zones dédiées au commerce et aux activités culturelles et récréatives.

Q 3
: Sur quelle base le processus référendaire actuel a-t-il pu être déclenché?

R : C’est la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme qui permet de faire la demande de participation à un référendum. Cette loi prévoit que des résidents peuvent contester une décision du conseil d’arrondissement qui touche à une question relative à l’urbanisme. Dans le cas qui nous occupe, c’est l’interdiction d’implanter de nouveaux lieux de culte que souhaiteraient contester les communautés religieuses ou leurs fidèles.

 
Q 4
: Quelles sont les étapes à suivre pour mettre en branle le processus référendaire?

R : Le processus référendaire comporte trois étapes bien précises. Dans un premier temps, il y a la demande d’ouverture d’un registre. Puis, il y a l’étape de la signature du registre. Dans un troisième temps, le cas échéant, il y a la tenue d’un vote référendaire.


Q 5
: Qu’est-ce qu’un registre?

R : Le registre est un document que les citoyens qui souhaitent contester la décision du conseil sont invités à aller signer.

Q 6
: Que s’est-il passé à l’étape de la demande d’ouverture du registre?

R : À cette première étape, des communautés religieuses, des commerçants ou des résidents qui voulaient contester l’interdiction d’implanter de nouveaux lieux de culte ont invité des gens qui ont une place d’affaires ou leur résidence dans l’une des zones géographiques prédéterminées à signer une pétition pour demander l’ouverture d’un processus référendaire.


Q 7
: En quoi consiste l’étape de la signature du registre?
R : Cette étape permet à ceux qui s’opposent au nouveau règlement et qui sont habiles à se prononcer de signer le registre qui sera mis à leur disposition au centre communautaire intergénérationnel d’Outremont.


Q 8
: Quand se tiendra la journée de signature du registre?

R : Le 8 septembre est la date qui a été déterminée en fonction des critères prévus dans la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme.


Q 9: Combien d’opposants au règlement interdisant l’implantation de nouveaux lieux de cultes devront signer le registre pour que les autorités municipales soient forcées de préparer la tenue d’un vote référendaire? 


R : Dans le cas de l’avenue Laurier, il faudra qu’un minimum de 176 personnes habiles à se prononcer signe le registre pour forcer la tenue d’un référendum dans cette zone bien précise. En ce qui concerne l’avenue Bernard, au moins 367 personnes devront signer le registre. Si ce nombre de signatures n’est pas atteint, il n’y aura pas de référendum et le nouveau règlement entrera officiellement en vigueur.

Q 10: Dans le cas d’un éventuel vote référendaire, les citoyens qui souhaitent le maintien de ce nouveau règlement destiné à limiter le nombre de lieux de culte sur Laurier et Bernard peuvent-ils gagner un tel référendum?


R: Si un nombre suffisant de résidents habiles à se prononcer se rend aux urnes le jour du référendum, les chances que le règlement soit maintenu sont bonnes. Bien sûr, la mobilisation citoyenne dans ces deux zones sera cruciale et déterminante pour favoriser la pérennité des commerces et de la qualité de vie sur ces deux artères névralgiques.


À bon entendeur, salut!

mercredi 24 août 2016

DEUX POIDS, DIEU MESURE!



«Tout le monde mérite une chance égale d’écrire son avenir». C’est le message que diffusait dans Le Devoir de samedi, la Centrale des syndicats du Québec à l’occasion de la rentrée scolaire.

Tous ne semblent, hélas! pas de cet avis. Le 19 août, M. Pierre Anctil lançait un cri d’alarme dans le quotidien Le Devoir. Si la société québécoise ne se ressaisit pas dans le dossier des écoles hassidiques, il soutient que des centaines d’enfants, leurs parents et leurs communautés seront les victimes d’abus intolérables.

Le 8 novembre 2010, Pierre Anctil racontait à l'Université Laval que «l'étude du talmud [par les garçons hassidiques], ce n'est pas très bon pour trouver un l'emploi».




L’amicus curiae des intégristes ultraorthodoxes brandit la Charte québécoise des droits et libertés pour nier à l’État le droit de dire son mot dans le cursus scolaire des enfants alors qu’ils sont à l’intérieur des murs de leurs établissements d’enseignement.

Le professeur sait fort bien que l’État et la société québécoise ne s’objectent aucunement à ce que des groupes minoritaires transmettent leur langue, leur religion et leur culture à leur progéniture. Ce qui est vraiment intolérable, c’est que cette transmission se fasse au détriment du droit à l’éducation que cette même Charte québécoise garantit en toutes lettres.


Le relationniste ne relève que les passages de la Charte qui conviennent à son discours. L’article 42 spécifie bien que les parents «ont le droit de choisir pour leurs enfants des établissements d’enseignement privés pourvu que ces établissements se conforment aux normes prescrites ou approuvées en vertu de la loi».


Il s’avère qu’en matière d’éducation, bien que ces écoles religieuses se nourrissent de généreuses subventions gouvernementales, elles n’ont jamais respecté le régime pédagogique prévu dans la loi sur l’instruction publique.


2015-04-28: Dans la même école illégale du 6355 avenue du Parc, on retrouve des enfants de trois ou quatre ans jusqu'à de jeunes adolescents

Quand, du matin au soir, six jours sur sept, des enfants sont forcés d’étudier presque exclusivement les textes fondateurs du judaïsme, nous sommes confrontés à une gigantesque entorse à l’esprit de la loi.

D’ailleurs,
 Pierre Anctil avait déjà fort bien illustré l’ampleur du problème. Dans une autre lettre ouverte au Devoir, il rappelait que si ces institutions ne respectaient pas les exigences du ministère, c’était que leur programme religieux était tellement exigeant que les enfants devaient y consacrer de nombreuses heures chaque jour. 

Et c’est ce même pédagogue qui nous raconte aujourd’hui que la voie de l’enseignement à la maison mérite d’être valorisée? Qu’il nous dise quand les enfants en trouveront le temps. Le soir, après une journée harassante? Guidés par leurs parents qui ont fréquenté les mêmes écoles talmudiques un quart de siècle plus tôt?

Pour respecter l’essence de la loi, il faudrait au contraire que l’école offre les matières «séculières» durant le jour et que les parents prennent tout le temps qu’ils veulent à la maison pour leur inculquer leurs valeurs cultuelles. N’est-ce pas la discipline qu’ils maîtrisent le mieux?

En dépit du fait que le DPJ ait dû recourir à l’assistance des forces policières pour avoir accès aux enfants et qu’aucun acquis éducationnel n’a été évalué, l’anthropologue yiddishophile est persuadé que la vie, le développement affectif et intellectuel des jeunes ne sont aucunement menacés.


Une des policières appelée en renfort par le DPJ pour soutenir l'intervention de l'organisme chargé de veiller au bien-être des enfants du Québec.

Faut-il donc trancher le bras d’une adepte ou pratiquer une circoncision fatale comme l’avait fait Moïse Thériault en Gaspésie pour que l’on se préoccupe du sort des enfants du Québec?

En juin 2014, pourtant, la situation des écoles hassidiques illégales était si préoccupante que la ministre responsable de la Protection de la jeunesse, Lucie Charlebois, avait assimilé la fréquentation de ces écoles à de la maltraitance ou à de la négligence pouvant y conduire. À la même époque, Camil Bouchard, ancien professeur au Département de psychologie de l’UQAM, rappelait que ces enfants sont tout simplement « piégés dans une communauté et ne peuvent espérer jouer un rôle de citoyens responsables ».

Dans Le phénomène des sectes, un ouvrage publié par le Centre de documentation et de consultation sur la pensée sectaire, on fournit certaines caractéristiques permettant d’identifier des groupes pouvant être dommageables pour l’intégrité physique et psychologique des membres.

Le zèle et la confiance absolue que les membres peuvent porter au leader, la nécessité de recourir au leader avant de prendre plusieurs décisions de la vie, l’obligation de socialiser et/ou vivre seulement avec les autres membres du groupe, les interdits sur ce que le membre peut lire, peut écouter ou voir, la possibilité de se marier librement dans le groupe, l’autorisation pour les enfants de jouer avec des enfants non membres font partie des signes à surveiller.


Menahem Mendel Schneerson, leader spirituel du judaïsme mondial. Une rumeur diffusée de son vivant voulait qu'il fût le Messie potentiel attendu par les juifs.

Pierre Anctil aborde avec romantisme la tradition hassidique. Mais en décrivant ces ouailles qui suivent les enseignements d’un certain nombre de maîtres qui tracent la voie exigeante à suivre, le docte professeur finit, malgré lui, par nous dépeindre les contours sectaires des groupes pour lesquels il monte au créneau. Cette façon dont un maître applique d'une manière particulière certains préceptes du judaïsme est justement une des balises que le professeur d’Ottawa utilise pour établir si un groupe constitue une secte.

Expressions extatiques d'un groupe de fidèles, lors du mariage du petit-fils d'un grand rabbin

En attendant de voir où mènera cette solution miracle de l’école à la maison, rassurons M. Anctil pour qui nos policiers appuyant un organisme de protection des enfants évoquent des «régimes totalitaires encore vivement présents dans la mémoire». Aucune chemise brune ne viendra mettre la clé dans la porte des écoles religieuses. Cela dit, si la lutte contre l’intégrisme n’est pas qu’un vain mot dans la bouche du gouvernement Couillard, il fermera le robinet des subventions aux écoles communautaristes qui déboulonnent le système d’éducation que nous avons si patiemment et si démocratiquement édifié. 
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P.s.: Le lendemain de la publication de ma réplique à Pierre Anctil, Frédéric Bastien*, professeur d'histoire au collège Dawson  publiait à son tour un article dévastateur à l'endroit de son collègue Anctil, dont il dénonce la mauvaise foi renversante et les raisonnements farfelus.

* Frédéric Bastien est, entre autres, l'auteur du livre choc La bataille de Londres dans lequel il raconte les dessous du rapatriement de la constitution de 1982 qu'il a qualifié de «coup d'état».