Vendredi dernier, le ministre de l'Éducation a livré le fond de sa pensée... creuse. Il estimait que l'achat de nouveaux livres n'était pas nécessaire pour plusieurs écoles. «Il n'y a pas un enfant qui va mourir de ça et qui va s'empêcher de lire, parce qu'il existe déjà des livres [dans les bibliothèques].»
Pôvre Dr Bolduc. C'est dommage qu'il n'ait pas fait son cours de médecine à Kansas City (Missouri). Là-bas, lors de leur admission, les futurs toubibs reçoivent en cadeau le bouquin On doctoring - Stories, Poems, Essays.
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Dans un article du Monde Diplomatique, Martin Winckler, médecin généraliste et écrivain, nous révèle que cet ouvrage contient des textes de Borges, de Kafka, de Tchekhov, de Pablo Neruda, de Conan Doyle, de la Bible et de bien d'autres auteurs. Le responsable de la faculté de médecine de Kansas City explique que ce livre est offert aux étudiants «parce qu'ils en apprendront plus sur le soin dans la littérature que dans les livres de pathologie où l'on n'apprend que la médecine.»
C'est peut-être un peu tard pour faire l'éducation du bon Dr Bolduc, mais avant de le lapider, pourquoi ne pas tenter de comprendre d'où il tire son intime conviction de l'inutilité des nouveaux livres?
Alors qu'un bibliothécaire d'une école de Verdun s'est aperçu que s'il retirait des étagères tous les ouvrages publiés avant 1995, il se retrouverait avec une bibliothèque vide, Bolduc, lui a vécu une expérience totalement différente, cet été.
Pendant que nous étions en vacances, le ministre de l'Éducation n'a pas chômé. Après avoir déclaré, le 27 mai dernier, qu'il allait faire le ménage dans les écoles hassidiques clandestines, des dirigeants de la secte lui ont fait un appel du pied. Ils l'ont convié à visiter une de leurs écoles tant réputées d'Outremont.
Grâce à leur pouvoir de persuasion légendaire, il semble que les dirigeants hassidiques aient séduit notre érudit ministre de l'Éducation.
Qu'ont-ils bien pu lui baratiner pour qu'il en arrive à dénigrer publiquement les nouveaux livres que les commissions scolaires réclament à grands cris pour leurs bibliothèques? Ils lui ont montré les collections d’œuvres talmudiques qui monopolisent toutes les étagères de leurs salles de classe. Bolduc a tout de suite allumé. Pour produire une élite infaillible, des ouvrages datant de 2500 ans font parfaitement l'affaire.