mardi 25 janvier 2011

LE BONHEUR DES FONDAMENTALISTES

Êtes-vous allé au palais de Justice de Montréal récemment? Moi, si.

Je vous défie d’entrer dans une salle d’audience du troisième étage avec votre coupe-ongles au fond d’une poche ou dans votre porte-serviette. Rayons X, portique de détection de métal, agents de sécurité munis de détecteurs manuels. C’est du sérieux. Un peu plus et il faudrait montrer fesse blanche
.

La semaine dernière, quatre intégristes sikhs fulminaient parce qu’on ne les a pas laissés approcher ministres et députés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale avec un kirpan à la ceinture.


Avez-vous déjà vu cette photo de Balpreet Singh, l’un des quatre sikhs qui souhaitait témoigner à la commission parlementaire sur le projet de loi 94 portant sur les demandes d'accommodement dans l'administration publique? Son kirpan d’acier pur (sarbloh) s’apparente davantage à un sabre à décapiter les blasphémateurs qu’à une bondieuserie inoffensive.

En 2005, alors que le sort du kirpan était entre les mains de la Cour suprême, c’est ce même Balpreet Singh demandeur d’accommodements qui avait affirmé au Citizen d’Ottawa qu’importe le jugement, il rejetterait tout compromis : «...regardless of the outcome, we cannot ever compromise on this issue». Entretemps, c'est VIA RAIL qui, par deux fois, l'a refusé sur ses trains. Seule la victoire totale était acceptable à
Balpreet Singh. «If I am following Guru Sahib's rehat (code of conduct), then it doesn't matter if the whole world is against me, Guru Sahib has promised me victory. »

Dans sa chronique du 21 janvier dernier, Christian Rioux prétend qu'en France, ainsi que dans la plupart des parlements européens, il n'y aurait pas eu d'affaire du kirpan pour la simple et bonne raison que les sikhs se seraient pliés de bonne grâce aux consignes de sécurité. Là bas, les règles sont claires, tandis qu'ici...

cliquer sur la photo

Ici, les intégristes de tout poil ont beau jeu de tester le système car ils savent tous que les cours de justice s'en tiennent sagement à la rectitude politique, que les politiciens se ménagent les groupes communautaristes pour les élections et qu'ils peuvent compter sur un contingent d'universitaires élevé au pablum multiculturaliste qui viendra à la rescousse dès la première secousse.

Le plus étonnant de tout, c'est que Balpreet Singh et ses trois acolytes venaient à l’Assemblée nationale défendre le port du voile intégral dans la fonction publique a
lors qu’un précepte du sikhisme bannit formellement le port du voile chez la femme.

Comme les intégristes juifs l’ont fait juste avant eux à propos du même projet de loi 94, les sikhs amritdhari (ceux qui ont été baptisés au Nectar) sont prêts à fermer les yeux sur le voile islamique pourvu que cela leur permette de préserver intacts leurs propres mantras fanatiques. Bref, ils sont tout sauf disposés à mettre un peu d’eau dans leur.. nectar divin.

On l’a compris depuis longtemps. Les accommodements à la Bouchard-Taylor sont le suc mielleux dont s’abreuvent les sectaires fanatiques pour gagner des forces et mieux se
propager dans les terres « infidèles » qu'ils colonisent.

Mais dites-moi. La très grande majorité des sikhs ne seraient-ils que de méprisables renégats? Après tout, sur les quelque 300 000 sikhs vivant au Canada, moins de 45,000 se considèrent obligés, par leur religion, de porter le sabre jour et nuit.

Pauvre Julius Grey! Lui qui s'était tant débattu pour arroser les fleurs de l'intégrisme, il vient de recevoir un coup de couteau dans le dos. «Rien ne laisse croire, dit-il, que le port du kirpan à l'Assemblée nationale représente un danger pour qui que ce soit.»

Supposons que Julius disait vrai, la «sécurité» devrait-elle être le seul facteur à considérer? Les us et coutumes, la laïcité acquise de haute lutte et
l’intégration à la société d’accueil ne devraient-elles pas aussi être prises en compte? Comme le signalait Louise Beaudoin du Parti Québécois, le Québec n'a jamais signé la Constitution canadienne et ne se reconnait pas dans le multiculturalisme.

Me semble de voir Julius
aller plaider devant la Cour suprême avec le «casse de poil» qu’il portait sur la rue Sainte-Catherine pour faire ses dernières courses de Noël.

Cliquer sur la photo pour zoomer

Il aurait beau clamer qu’il s’agit d’une relique sacrée de son arrière grand-père, qu’il est animé d’une foi sincère, qu’on lui aurait fait jurer, sous peine d’aller en enfer, de l’arborer toute sa vie jour et nuit, été comme hiver et que ça ne représente AUCUN DANGER pour les illustres membres du plus haut tribunal du pays, je peux vous dire tout de suite que les très Honorables s’empourpreraient et refuseraient de l’entendre.
Point à la ligne.

P.-s.: Ils s'en trouvera toujours pour insinuer que ce refus de tout accepter n'est que le fruit d'un vieux fond xénophobe des Québécois.

Si on qualifie de racisme le fait de baliser les comportements au sein de notre société, quel épithète assez puissant faudra-t-il inventer pour qualifier les intégristes islamistes qui souhaitent la mort des chiens d'occidentaux, les 300 rabbins ultraorthodoxes qui viennent d'appuyer un interdit de louer ou vendre des maisons à d'autre qu'à des juifs, ou encore les Lefebvristes d'extrême-droite que nous présentait Enquête, la semaine dernière sur les onde de Radio-Canada? Franchement, les mots nous manquent.

Heureusement, Richard Martineau est venu à la rescousse et a pris la relève en rajoutant son grain de sel à propos de cette histoire des intégristes sikhs à l'assemblée nationale.

Lisez sa chronique intitulée Malade, ce sikh

3 commentaires:

Roman Korol a dit…

L'état des choses tel que décrit est à ce point désopilant que si cela n'existait pas pour le vrai, on ne saurait aucunement l'inventer. Only in Canada . . .

Jean-Marc Corbeil a dit…

Ce qu'il y a de non fondamental pour la démocratie, c'est précisément le fondamentalisme qui vise à s'imposer soit par la force, soit par la démocratie qui, du coup, se voit démocratiquement abolie.

Cependant, pour que le fondamentalisme s'impose, il faut des collaborateurs intéressés. Pour les politiciens et les avocats comme Julius Grey, seule la liberté d'expression religieuse est fondamentale. Tout le reste est à proscrire!

Roman Korol a dit…

Monsieur Corbeil dit vrai. Par ailleurs, pour ceux et celles qui aimeraient savoir un peu plus sur le sikhisme voici un survol - un peu aléatoire, ce qui fait son charme - par le commentateur américain Gary Brecher (aka "The War Nerd"). Je vous souhaite bonne et agréable lecture et espère que cela saura ensoleiller votre journée:

http://www.exile.ru/print.php?ARTICLE_ID=8656&IBLOCK_ID=35

Les gens de cet acabit savent bien comment gagner leurs causes par l'usure pure et simple. C'est cette qualité-là qui distingue les grands gourous et les fondamentalistes intransigeants de tout acabit.