vendredi 29 octobre 2010

LE NIQAB MUNICIPAL

Le 4 octobre dernier, lors de la séance du conseil d’arrondissement, un avis de motion figurait à l’ordre du jour au point 10.05 (A) sous le titre Affaires nouvelles. Voici ce qu’on y lisait :

« Avis de motion — Modification à la Réglementation relative à la circulation et au stationnement — Inclusion de nouvelles dispositions permettant au conseil d'arrondissement d'adopter des ordonnances visant à permettre la levée des interdictions de stationnement. »

Tiens! Tiens. C’est ça qu’ils appellent des Affaires nouvelles? Woufff! Ça sent plutôt le réchauffé, pour ne pas dire le brûlé! Au point où nos détecteurs de fumée se mettent à sonner.

Croyez-le ou non, Marie Cinq-Mars et Louis Moffatt s’apprêtent une fois de plus à faire les quatre volontés d’Alex Werzberger et de Michael Rosenberg qui voudraient pouvoir laisser Jaguar et Lexus dans la rue lors des jours de fête religieuse et ce, même si les panneaux de stationnement l’interdisent.

Comme ils n’en démordent pas, la mairesse et son
conseiller envisagent d’officialiser la pratique illégale de couvrir d’un niqab en « Foamcore » les panneaux qui empêchent tant les intégristes religieux de se recueillir.

Un niqab en Foamcore comme ceux dont se sert Outremont pour couvrir les panneaux d'interdit de stationnement

Cette mesure remise à l’ordre du jour est d’autant plus choquante qu’il y a dix ans, soit le 17 juillet 2000, Marie Cinq-Mars, alors conseillère sous l’administration de Jérome Unterberg, avait voté — comme tous les autres élus de l’époque — l’abolition de l’article 18.11 du règlement de stationnement qui permettait justement de suspendre les interdits de stationnement pour les fêtes religieuses.

À l’époque, pensez-vous que les dirigeants hassidiques s’étaient formalisés du nouveau règlement 1330 qui leur niait le droit de garer leurs chars n’importe où et n’importe quand? Poser la question, c’est y répondre.

Dès 2001, pendant les fêtes de Pâques, 45 ultrareligieux ont délibérément choisi de faire de la résistance passive en ne déplaçant pas leurs voitures en contravention de la réglementation. Ils ont évidemment contesté les contraventions qu’ils avaient reçues en plaidant que le règlement municipal violait leur liberté religieuse.

Malheureusement pour eux, le 8 juillet 2003, l’honorable juge Raiche de la Cour municipale d'Outremont a rejeté leurs prétentions et les a condamnés à payer leurs contraventions comme tout le monde. Le Point d'Outremont en avait fait un bref compte-rendu.

Les intégristes n’ont pas baissé les bras pour autant. Ils n’ont même pas pris la peine d’interjeter appel du jugement. À quoi bon puisqu’il leur suffisait de faire un « deal » en coulisse avec les élus municipaux qu’ils manipulent à leur guise.

Ne me regardez pas comme ça; l’expression n’est pas de moi. C’est le président de la Coalition d'organisations hassidiques d'Outremont, Alex Werzberger, qui l’a utilisée le plus simplement du monde dans une entrevue accordée à L’Express d’Outremont, le 25 janvier 2007.

Dans le même article, le bon maire Harbour avait renchéri en soutenant que « c'est une décision qu'on a prise sur la recommandation de la Commission consultative sur les relations intercommunautaires ». N’ajustez pas votre appareil... vous avez bien lu. Faut-il vous rappeler qu’à cette époque, le puissant Michael Rosenberg siégeait de tout son poids à cette très bienveillante commission? Cliquer ICI pour prendre connaissance du compte-rendu de la Commission et de l'intervention de Rosenberg.

Tout ce beau monde a eu le culot d’affirmer que cette mesure n’allait pas uniquement profiter aux membres de la communauté hassidique. C’est sûr, c’est sûr, les goyim que nous sommes en avons joui comme ça ne se peut pas de cette levée d’interdit de stationnement pendant les fêtes juives.

Ce que nos élus ne nous disaient pas et qu’ils ne nous diront pas davantage aujourd’hui, c’est que c’est vous et moi qui payons pour ces caprices religieux d’un autre temps alors que le juge Raiche avait statué clairement que les besoins religieux particuliers ne doivent pas être à la charge de la société.

En avril 2003, par exemple, uniquement pour couvrir les panneaux d’interdiction de stationner dans le cadre d’un seul événement religieux, les contribuables du Plateau ont dû se farcir une facture de 2 248,66 $, tandis que les payeurs de taxes de Côte-des-Neiges, eux, ont assumé une note de frais de 6 369,01 $. En 2010, au tarif horaire des employés municipaux et du matériel roulant, vous ne voudrez pas savoir combien vous coûtent ces rituels théoconservateurs. Allez! Je vous épargne.

Pas satisfaite de passer outre à son règlement 1330 du 17 juillet 2000 et de s'essuyer les pieds sur le jugement de 2003 qui déboutait les prétentions des ultraorthodoxes, Marie Cinq-Mars cèdera-t-elle une fois encore à la pression des ultrareligieux? Nous le saurons lundi soir prochain, à 19 heures. C’est un rendez-vous à ne pas manquer à l’Hôtel de Ville d’Outremont, au 530, avenue Davaar.

Comme l’a déjà écrit le journaliste Michel C. Auger, le 22 janvier 2007, «Ne pas donner de contraventions à la communauté hassidique le jour du sabbat, c’est peut-être politiquement rentable pour le maire de l’arrondissement d’Outremont, mais ce n’est pas un accommodement raisonnable. C’est un privilège, ce n’est pas pareil.» Eh! Non. C'est vraiment pas pareil.


P.-S.: Parlant de levée d'interdiction de stationnement, voyez deux photos toutes récentes prouvant que Michael et Martin Rosenberg n'attendent pas que les niqabs soient posés sur les interdits de stationnement pour contrevenir aux règlements municipaux en la matière. On ne se refait, hélas! pas.





La voiture de Michael Rosenberg en double file devant sa synagogue de la rue Hutchison, le 22 septembre 2010








Martin dans la zone vignette 27, à 19h26,
le 26 septembre 2
010 (devant la même
synagogue)

vendredi 22 octobre 2010

QUEBEC BLASTING - 3 de 3



«Objectivement, tenter de trouver [au Québec] des preuves concrètes de discrimination antisémite - des gestes à l’encontre de Juifs entraînant des pertes ou des séquelles – c’est comme chercher une aiguille dans une botte de foin.»*
Morton Weinfeld, 1993

Le 19 novembre 2009, le Centre d'études ethniques des universités montréalaises (CEETUM) organisait une conférence sur les rapports entre les francophones et la communauté juive au Québec. On se questionnait sur la présence de l’antisémitisme aujourd’hui. J’ai eu la chance d’assister à cette conférence donnée sur l’heure du midi.

Morton Weinfeld, professeur de sociologie à l’Université McGill, était l’un des trois panélistes invités à discourir sur ce sujet chaud en cette ère post Bouchard-Taylor.


  

Contrairement à plusieurs de ses coreligionnaires, M. Weinfeld n’est pas de ceux qui prennent un malin plaisir à dépeindre faussement les Québécois comme étant plus antisémites que partout ailleurs au Canada. Il n’en déplore pas moins qu’un mur continue de séparer les francophones des juifs. «Ce n’est pas la haine, dit-il, mais il y a une distance sociale et culturelle [entre les deux groupes].»

Lors de son allocution, Morton Weinfeld a appuyé son assertion en utilisant deux exemples qui, à ses yeux, servent d’indicateurs. Il a d’abord pris le cas de la mairie de Toronto. Alors que la Ville Reine a fait élire trois maires juifs depuis l’après-guerre, le professeur a fait remarquer que Montréal, elle, n’en a encore jamais fait élire aucun. À titre de deuxième illustration, il a attiré notre attention sur la politique provinciale. «Les partis libéral, conservateur et NPD ontarien ont eu des leaders juifs alors qu’au Québec, ça ne s’est encore jamais vu.»

Je dois avouer que ses deux exemples m’ont un peu déconcerté. Je n’ai pu faire autrement que de me rappeler la remarque qui avait fait scandale lors de la crise qui a éclaté en janvier 2009 au sein de l’organisme Droits et Démocratie (cliquer ICI pour le reportage de Radio-Canada). Souvenez-vous. M. Jacques Gauthier, le président par intérim de l’organisme «non partisan» destiné à appuyer les droits humains dans le monde, s’était étonné «qu’il n’y avait pas d’employés juifs au bureau de Droits et Démocratie à Montréal».

Je ne suis pas particulièrement ferré en statistiques, mais en sachant que le Québec compte quelque 100 000 personnes se proclamant d’origine juive, ils ne représentent que 1,4% de la population québécoise. Dans ce contexte démographique est-il vraiment choquant ou particulièrement révoltant de constater qu’aucun membre de cette communauté très diversifiée n’ait encore décroché le poste de maire de la métropole ou de chef d’un parti politique québécois?

Si cette situation l'interpelle, comment réagirait-il si on lui rappelait qu’aucune Québécoise - elles ne constituent pas 1,4%, mais bien au moins 51% de la population de la province - n’a encore occupé le poste de maire de Montréal et une seule a été élue chef d’un parti provincial? Si M. Weinfeld souhaitait dénoncer ce «scandale antiféministe», je serais bien prêt à manifester avec lui.

La question de représentativité dans la société n’a pas été le seul argument avancé par Morton Weinfeld cette journée-là. Pour démontrer que le milieu anglophone est beaucoup plus ouvert à la communauté juive que ne le sont les francophones, le titulaire de la Chaire en études ethniques canadienne a relevé le fait que les dictionnaires anglais ont intégré un bon nombre de termes yiddish. Qu’en est-il des dictionnaires français? «Si vous prenez Larousse ou Robert, vous ne trouverez pas un seul mot d’origine yiddish», affirme Weinfeld avant de conclure que «la langue anglaise est beaucoup plus ouverte aux autres langues que le français.» Je vous laisse réfléchir sur ce jugement sans appel.



 

S’il fallait un autre exemple de la distance culturelle qui sépare les citoyens juifs des francophones d’ici, M. Weinfeld rappelle qu’au niveau des arts, «la production juive a toujours été et continue d’être plus florissante en anglais». Il en veut entre autres pour preuve la production des Mordecai Richler, des Leonard Cohen et... l’émission Seinfeld.

Est-ce si étonnant quand on sait que la très grande majorité des Juifs ont adopté la langue de Shakespeare et qu’en Amérique du Nord, la force d’attraction de l’anglais est pratiquement irrépressible?

Morton Weinfeld a reconnu que les particularités historiques et religieuses propres au Québec ont fait en sorte que la population juive n’a d’abord pas eu le choix d’adopter l’anglais puisque le clergé catholique refusait de les admettre dans les écoles francophones. Soit! Mais qu’en est-il depuis que cet obstacle a été levé?

Un enseignant qui se trouvait dans l’amphithéâtre (je n’ai pas saisi son nom) a fait remarquer qu’il n’a perçu aucune amélioration en ce sens au cours des dix dernières années. Il a également rappelé que non seulement la nouvelle génération répugne à fréquenter l’école française, mais qu’en plus, elle privilégie les écoles ségréguées. «Ne pensez-vous pas, dit cet enseignant, qu’un tel comportement aura des répercussions négatives sur les rapports et les rapprochements intercommunautaires?» L’auditoire attend encore une réponse à cette question.

Tout au long de cette conférence, il n’a été question que du cas des juifs ashkénazes. Pas un traître mot sur les Sépharades provenant du Maghreb et qui sont francophones. Pourtant quand on s’avise d'étudier sérieusement les rapports entre les communautés juives et francophones, il est tout de même étonnant que l’on n’ait même pas pensé à sonder les cœurs des juifs francophones.

Tout en avouant n’avoir jamais fait d’études sur la communauté sépharade, le professeur Weinfeld n’a éprouvé aucune gêne à supputer que «l’enracinement des Sépharades dans leur culture et leur identité juive est tel, que ça doit poser des problèmes pour une intégration totale dans la population du Québec». Ce serait donc comme du beurre dans la poêle entre les juifs anglophones et les Canadians, mais comme l’huile et l’eau entre les Sépharades et les Québécois francophones? Si la cause est déjà entendue, pourquoi donc continuer à donner des conférences sur le sujet?

À écouter Morton Weinfeld, on pourrait conclure que ce sont les francophones qui érigeraient un mur social et culturel à l’encontre de leurs concitoyens juifs. Est-ce si sûr?


 
Pour l’anecdote, je me contenterai de référer à un article que le sociologue Gary Caldwell avait publié dans l’édition de juin 1994 du magazine L'Agora.

Dans Le discours sur l'antisémitisme au Québec, Caldwell dénonçait les lacunes de la thèse de doctorat d’une certaine Esther Delisle dont Mordecai Richler s’était inspiré en 1991 pour pondre son brûlot sur l'antisémitisme québécois dans le magazine New Yorker.

Caldwell s’était entre autres indigné du fait que les études publiées sur le thème des Juifs au Canada étaient à toutes fins utiles la chasse-gardée d’individus s’identifiant comme Juifs. À titre d’exemple, il avait référé à l'anthologie The Jews in Canada à laquelle Morton Weinfeld avait participé. «Les éditeurs, déplorait Caldwell, ont réussi à rassembler vingt-quatre articles et cinq documents d'introduction sur les Juifs au Canada sans jamais citer les ouvrages produits par des non-Juifs sur des sujets pertinents.» Même le fameux Pierre Anctil avait été abandonné en bordure du chemin. On repassera pour l’impartialité et les prêches de Weinfeld sur le rapprochement des deux cultures!

Il y a tout de même au moins une chose sur laquelle je suis devenu plutôt en accord avec Morton Weinfeld: son agacement face à la publication de certaines caricatures stéréotypées dans des journaux.

Je n'ai pas en main les illustrations qu'il avait présentées lors de son allocution, mais les exemples qui suivent feront tout aussi bien l'affaire.


Rappelez-vous les caricatures publiées en juin 2007 au moment où les médias avaient révélé que les ténors de la communauté juive québécoise avaient fait un appel du pied à 

Mario Dumont. 

 

À l’époque, en voyant le chef de l’ADQ représenté avec boudins et shtreimel (ou kippa), je n’y avais rien vu de choquant. Au contraire, j’avais plutôt rigolé.

Avouons que pour un caricaturiste, l’exotisme de l’accoutrement des hassidim est une invitation quasi irrésistible à s'en servir pour représenter les juifs.

Il aura fallu que j’entreprenne mon combat pour dénoncer le laxisme des autorités municipales et provinciales face aux ultraorthodoxes juifs pour changer d’opinion.

 


Tant dans le milieu journalistique que dans la population en général, on ne s’embarrasse pas de faire une distinction entre la minorité intégriste ultraorthodoxe et LES communautés juives. Pourtant, il y a un gouffre qui sépare les deux mondes.
Même Lysiane Gagnon me rejoint là-dessus. Dans sa chronique du 8 mars 2008, elle écrivait :


«Comment peut-on, dans une société instruite et développée, confondre les Juifs en général avec les hassidim, cette communauté ultra-orthodoxe et marginale qui a autant de points communs avec les juifs que la secte des Apôtres de l’Amour infini en a avec les catholiques ?»

Sauf si un fait ou une nouvelle se rapporte à la communauté hassidique, il me semble inapproprié de représenter les «autres» Juifs avec les attributs saugrenus des intégristes ultraorthodoxes tout comme je trouve inadéquat d'associer des critiques à l'égard d'une frange marginale d'intégristes à l'ensemble des Juifs.


Vous comprendrez alors combien j'ai été estomaqué de lire dans La Presse du 1er septembre 2010 que l'on me qualifiait de «citoyen d'Outremont connu pour ses propos controversés sur les Juifs». Mon sang a fait trois tours. 


Si on voulait dire que je ne suis pas tendre à propos des agissements de certains intégristes hassidiques, je ne m'en serais pas offusqué. Mais je ne puis accepter que l'on fasse un amalgame injustifié entre les ultraorthodoxes et les Juifs afin de me discréditer et de laisser sous-entendre que je suis antisémite. Cela est soit malhonnête ou alors le signe d'une certaine ignorance.

 


En mars 2010, lorsque j'avais rencontré Martin Patriquin, le journaliste du Maclean's par qui est venu le scandale du Bonhomme Carnaval véreux, il m'avait fait part de son malaise en voyant un de mes photomontages. On y voyait le conseiller d'Outremont Louis Moffat affublé d'un shtreimel et de rouflaquettes en glace.

Patriquin avait beau jeu de jouer les vierges offensées, il reste que je revendique encore et toujours le droit et la liberté de représenter Moffatt et sa mairesse dans cet attirail puisque l'un comme l'autre ont fait mille fois la preuve qu'ils «font la belle» pour le plus grand bonheur de leurs maîtres hassidiques.


Résumé en images:
 

No.1






1 - Pas très kosher si les hassidim n'ont rien à voir avec la nouvelle.



No.2

 

2 - Ça irait si on indiquait qu'il s'agit des écoles hassidiques


No.3

 

3 - Aucun problème. Même les Québécois mangent cachère... sans le savoir! Certains argumenteront que c'est de la rectitude politique frileuse. Il est possible qu'ils n'aient pas pas tout à fait tort.

On s'arrête où? On fait quoi, par exemple, avec l'image de la mafia que l'on accole aux Italiens? 


 

Quand un Gagliano trempe dans les commandites, la caricature ci-contre lui va comme un gant!

Mais, à la lumière de ce qui précède, pourquoi ne pas demander l'avis d'un Chapleau ou d'un Martineau? Ce dernier a déjà écrit un article sur le sujet. Ça s'intitulait La peau courte. Peut-être qu'à la lecture de cette chronique aura-t-il quelque chose à ajouter? L'appel est lancé.



* «Objectively, finding concrete evidence of anti-Semitic discrimination - acts directed against Jews leading to some loss or penalty - is like finding a needle in a haystack».

Morton Weinfeld

jeudi 14 octobre 2010

QUEBEC BLASTING - 2 de 3


 
Le 14 mai 1948, David Ben Gourion prononçait la Déclaration de l'indépendance d'Israël au Tel-Aviv Art Museum.


La cérémonie qui rassemblait le premier Premier ministre d'Israël et son cabinet s'est déroulée sous l'égide bienveillante de Théodore Herzl, le père du sionisme politique moderne, dont le portrait trônait au-dessus de l'assemblée.

C'est Herzl qui, en 1897, avait planté le premier jalon de l'état juif en fondant en Suisse le mouvement sioniste devant quelque 200 délégués juifs d'Europe, d'Afrique du Nord, d'Amérique et d'ailleurs.Malheureusement, ce fait d'armes n'empêchera pas certains de ses détracteurs de le qualifier d'antisémite, comme en fait preuve ce reportage en trois parties intitulé «Théodore Herzl, le côté antisémite du sionisme».

Après lui, bien d’autres grandes figures israéliennes ont été souillées par cette accusation d’être hostile envers le peuple juif. Ce fut, entre autres, le sort de Menahem Begin lorsqu’il ordonna le retrait du Sinaï et qu’il signa, en 1979, les accords de paix avec le président égyptien Anouar el-Sadate.

Plus près de nous, en 1995, les stigmates de l’antisémitisme se logèrent dans la chair de Yitzhak Rabin, assassiné par Yigal Amir, un illuminé d’extrême droite qui lui reprochait son engagement dans le processus de paix avec les Palestiniens. Aujourd'hui, il n'est pas rare qu'un politicien israélien traite un adversaire de «Hitler», de «nazi» ou de «SS». C'est la banalisation d'un crime contre l'humanité. 


Même la Cour suprême d'Israël a été qualifiée d’antisémite par les ultraorthodoxes. En 1996, ces derniers ont crié au meurtre lorsque la Cour suprême a autorisé la circulation automobile durant le shabbat sur une avenue de Jérusalem.
 


Cliquer sur la photo ci-haut pour d'autres d'images des confrontations

En 1999, les extrémistes religieux n'ont pas digéré non plus que le plus haut tribunal du pays conteste le caractère légal de l’exemption du service militaire accordé à des dizaines de milliers d’élèves ultra religieux des séminaires talmudiques. En 2010, la décision de la Cour suprême de supprimer les discriminations entre juifs ashkénazes et sépharades dans une école a encore fait sauter les plombs des hassidim.

Quand on sait que des juifs israéliens traitent de nazis et d'antisémites d'autres descendants du royaume de Judée et de la Shoah, on ne se surprendra pas que l’accusation d’antisémitisme soit désormais décochée sur tout ce qui bouge partout sur la planète. Même le gouvernement de Stephen Harper s'est permis d'accuser les Libéraux fédéraux et Ignatieff d'antisémitisme. Il faut le faire!

Et plusieurs s’y adonnent comme à un sport d’élite. Et je sais de quoi je parle. Depuis deux ans et demi, Michael Rosenberg pratique ce sport à mes dépens. Le gros contributeur hassidique du gouvernement conservateur m’a collé deux procès dans le seul but de se débarrasser d’un dénonciateur des gestes délinquants et antisociaux que lui et d’autres dirigeants hassidiques commettent généreusement avec la bénédiction de nos dirigeants politiques.

Dans l’espoir de me faire lâcher prise et de salir à tout jamais ma réputation, le président de l’empire Rosdev n’allait surtout pas se priver de pointer sur moi l’arme automatique du racisme et de l’antisémitisme.

Le 31 août dernier débutait (enfin!) l’un de mes procès devant la Cour du Québec. Devinez un peu quel argument les Rosenberg père et fils ont sorti de leur shtreimel. Eh oui! Ils ont tous deux invoqué l’holocauste. Je croyais rêver. Mais plutôt que de vous raconter ce qui s’y est passé, sa Majesté la Reine et moi-même vous convions plutôt à vous présenter au palais de Justice de Montréal, le 22 novembre prochain, pour assister à la suite et, espérons-le, à la fin de ce procès mémorable. C’est gratuit (pour les spectateurs!) et fort instructif. Vous ne devriez pas vous ennuyer.

D’ici là, je vous suggère fortement de visionner Defamation (cliquer sur le lien), le documentaire du jeune cinéaste israélien Yoav Shamir qui raconte que l’antisémitisme est une industrie qui tourne à plein régime. À tel point qu’en Israël, il ne se passe guère de jour où l'on ne rencontre les mots «nazis», «Holocauste» ou «antisémitisme» dans un journal.

 


Un documentaire brise-tabous qui montre la manière dont les jeunes Israéliens sont élevés dans l'ombre oppressante de l'holocauste.

Sur le point d'entrer dans l'armée israélienne, les jeunes garçons et filles sont préparés psychologiquement pour la visite qu'ils feront aux anciens camps d'extermination nazis. Professeurs et services secrets créent une véritable psychose de la haine chez ces jeunes.

Le cinéaste démontre que la Ligue anti-diffamation - la plus grande organisation au monde qui combat l'antisémitisme - cherche par tous les moyens à entretenir la culpabilité des autres nations envers les juifs.


 

Dans les journaux, une hausse des actes antisémites vend mieux!

 


Chaque évènement, de la plus petite tracasserie aux gestes les plus ignobles sont épluchés, disséqués et comptabilisés dans la grande colonne des crimes haineux.

À force de crier au loup et de jouer volontairement sur le complexe de culpabilité, certaines personnes, même des rabbins, ne peuvent pas faire autrement que de douter de la véracité des incidents.


À voir l'expression d'Abraham Foxter, ci-contre, le dirigeant de la Ligue Anti-diffamation qui a son siège social à Manhattan, on comprend que le film «grafigne» et fait mal.



Norman Finkelstein

En visionnant Defamation, ceux qui n'ont jamais entendu parler de Norman Finkelstein feront une découverte.

Ce fils de juifs survivants du ghetto de Varsovie s'est, entre autres, fait connaître par les polémiques suscitées par sa critique de ce qu'il a appelé «l'Industrie de l'Hococauste», terme par lequel il désigne les organisations juives qui, selon lui, instrumentaliseraient la Shoah dans un but politique ou mercantile.

Un film parfait pour la petite fin de semaine pluvieuse qui s'annonce.

dimanche 10 octobre 2010

QUEBEC BLASTING - 1 de 3


Allons, allons, mes amis! S’il fallait que nous déchirions notre chemise chaque fois qu’un torchon médiatique du reste du Canada nous crie des noms et nous traite de corrompus ou de mafieux, notre garde-robe serait vide depuis longtemps. Faut-il vraiment crier au meurtre parce qu’on nous présente comme des gangsters congénitaux? Après tout, dans l’imaginaire populaire, les Al Capone, Mesrine et compagnie ne sont-ils pas en quelque sorte devenus des demi-dieux qui commandent respect et admiration?

Croyez-moi, le Quebec Bashing c’est un petit pétard à mèche à côté du Quebec Blasting que constitue l’accusation d’antisémitisme. Ça, c’est de la dynamite! Au Québec, ceux qui se servent de l’arme de l’antisémitisme pour déchiqueter la réputation de leurs victimes ont la partie belle. Ils n’ont même pas besoin d’importer leur nitroglycérine théologique de Toronto. Le Québec regorge de la matière première et des ressources humaines nécessaires à la fabrication de ce cocktail explosif : la rectitude politique et un foisonnement de minorités.

Comme l’écrivait le sociologue des médias Jean-Serge Baribeau, dans La Presse du 14 juin 2008, «La majorité est régulièrement soupçonnée d'être raciste [et] xénophobe.» Mais M. Baribeau rappelait à ceux qui l’oubliaient que «la démocratie ne peut pas être la tyrannie plus ou moins ouatée des diverses minorités [et elle] ne peut exister lorsqu'il y a un sentiment de mépris vis-à-vis de la majorité, soupçonnée d'être raciste et méchante».

Avouons qu’au fil des dernières décennies, il s’en est cassé du sucre sur le dos des Québécois.


Mordecai Richler est certainement un des plus célèbres artificiers made in Quebec en matière d’antisémitisme.

 
Né et élevé dans le Mile-End, sur la rue Fairmount, le grand écrivain a utilisé cette bombe sale à maintes reprises à l’encontre des Québécois francophones. La diffamation collective s’est avérée sa grande spécialité.

C’est en 1977 que Richler avait commis — si je ne m’abuse — son premier attentat terroriste contre les sympathisants de l’indépendance. Il s’était servi de la tribune du magazine américain Atlantic Monthly pour lancer qu’au soir de la victoire du Parti Québécois, les militants indépendantistes en liesse avaient entonné un chant des Jeunesses hitlériennes.
Baboum!


Ses mots assassins avaient explosé comme autant de shrapnels au visage de René Lévesque. Pourtant, c’était totalement faux. Ce soir-là, les partisans de Lévesque avaient plutôt chanté un air composé pour Cabaret, le film musical américain de Bob Fosse sorti en... 1972! Bonjour la malhonnêteté intellectuelle crasse et la paranoïa schizophrénique!
 

Sa deuxième bombe sale, Mordecai Richler l’avait placée dans l’édition du 23 septembre 1991 du journal américain The New Yorker. Dans son brûlot intitulé Inside/Outside, Richler avait conclu que l’antisémitisme était un élément constitutif du nationalisme québécois moderne. Cette nouvelle déflagration avait provoqué une réaction en chaîne des médias. Au plus fort de la polémique, la journaliste Madeleine Poulin avait invité Mordecai Richler à expliquer ses déclarations incendiaires, dont celle où il compare les femmes québécoises à des truies. Cliquer ICI pour visionner l’entrevue.

Six mois plus tard, Mordecai Richler, devenu une espèce de Carlos pamphlétaire, récidivait en lançant un nouvel engin explosif intitulé Oh Canada! Oh Québec! Requiem pour un pays divisé. En plus de remuer les bas-fonds historiques périmés, il se déchaînait contre les lois linguistiques du Québec et allait même jusqu’à inventer un sondage qui conclurait que 70 % des Québécois sont profondément antisémites.

C’en était trop pour Jean-François Lisée qui, le 31 mars 1992, au lendemain d’un duel en règle avec Richler au réseau News World, dénonce l’infamie de Mordecai à l’émission de Christiane Charrette. Cliquer ICI pour entendre l’interview d’un Jean-François Lisée gonflé à bloc. C’était toute une époque.


Mais pour s’enrôler comme mercenaire ou comme tireur embusqué dans la guérilla du salissage, pas besoin d’être un zélote du B'nai B'rith. Pour n’en donner que deux exemples, pensons aux mésaventures de l’écrivain Claude Jasmin et du «Robin des banques», Yves Michaud.


En 1988, pour avoir vertement décrié «l’apartheid» dans lequel se retranchent volontairement les hassidim d’Outremont, Jasmin a été mitraillé dans deux grands quotidiens francophones de Montréal. 

Qualifié d’antisémite, le nationaliste traqué qualifiera de «pissous» les dignitaires du PQ qui hésitaient alors à l’inclure comme aspirant-député d’Outremont.

Le 14 décembre 2000, c’est Yves Michaud qui, à son tour, goûtera à la médecine de cheval que Lucien Bouchard lui servira avec une couardise ubuesque. Bouchard fera adopter par l'Assemblée nationale du Québec une motion de blâme pour des déclarations prétendument «inacceptables» qu’aurait prononcées Michaud.

Le pire, c'est que contrairement à ce que l'on a souvent colporté, Michaud n'a pas été lynché pour avoir dit au sénateur Kolber (avec qui il s'entretenait chez leur coiffeur commun) que le peuple juif n’avait pas le monopole de la souffrance dans le monde. Que non. Il s'est fait crucifier sans procès pour avoir invité les Québécois «à posséder, comme les Juifs, leur âpre volonté de survivance, leur invincible esprit de solidarité, leur impérissable armature morale».


Il s'agissait d'une citation du chanoine Groulx qu'il avait reprise lors de son témoignage dans le cadre des États généraux sur la situation et l'avenir de la langue française au Québec. Une phrase tout à l'opposé d'une injure antisémite. Comme on dit, quand on veut tuer son chien, on prétend qu'il a la rage. L'Affaire Michaud est aujourd’hui le titre d’un livre publié récemment et qui raconte son exécution parlementaire.

La chasse aux antisémites «pure laine» est-elle moins populaire dans cette ère post-Bouchard Taylor? Les assises de la rectitude politique commencent-elles à s’effriter pour la peine dans les milieux de «gauche»?

Avec une pointe d’amertume qui transpire encore d’un article qu’il a fait publier dans La Presse du 18 février 2007, Claude Jasmin semble croire que les choses ont un peu bougé puisqu’«on discute [maintenant de] «séparatisme hassidim» partout sur les places publiques, avec grands reportages illustrés...». Mais l’écrivain échaudé déplore qu’il aura fallu attendre 20 ans «pour un peu de courage et de liberté. Vingt ans avant que les bien-pensants froussards se grouillent le cul. Pleutres, alors que nous formons 88 % de la population...»

Cinq mois après la publication des propos de Jasmin, je suis tombé sur un article de Barbara Kay, journaliste au National Post et qui traitait d’Outremont et du «problème» hassidique. Elle écrivait ceci : «Hasidim have zero interest in any social interaction with the outside world. By outside world I don't mean only Gentiles, but any non-Hasidic Jew. Mainstream Jews are not only invisible to Hasidim, they are also seen as apostates, and therefore worthy of contempt, as opposed to the indifference shown to Gentiles.»


Je suis resté bouche bée et me suis dit que Claude Jasmin avait peut-être vu juste: le tabou avait été ébranlé. Je n’ai même pas voulu m’arrêter à penser que l'équation aurait pu être faussée par le fait que Barbara Kay soit juive.

Si Marie Cinq-Mars, la mairesse d’Outremont, et son fidèle conseiller Louis Moffatt sont définitivement des causes perdues, du côté du Plateau Mont-Royal, par contre, je vois le début d'un filet de lumière au bout du tunnel.

C'est encore plus vrai quand j’entends le conseiller de ville Alex Norris abonder dans mon sens.Depuis que Norris a admis devant caméras que les accusations d’antisémitisme sont trop faciles à lancer, je réécoute en boucle cette phrase magique de six secondes qu'il a prononcée lors de la séance du conseil d'arrondissement du 3 mai dernier. 


Et vous savez quoi? Ça me donne chaque fois un peu plus confiance en l'avenir! Comme me disait mon défunt père : «Fonce et sois positif!». Aussi, chaque fois que je le peux, je m’accroche à la moindre lueur d’espoir.