Le philosophe québécois André Moreau l’a déjà dit : « Il y a toujours eu des jovialistes : les épicuriens, les gnostiques, les cathares, les fouriéristes, les Dadaïstes, etc. Mais, aujourd’hui, ils s’organisent. » Je pense qu’il en a oublié une « batche ». Les rabbins ultraorthodoxes. Pourtant, ils sont nombreux à se faire les apôtres d’une existence forte, stimulante, joyeuse, riche, cultivée et chaleureuse. J’en connais même un. Le rabbin Gilbert Crémisi.
Quand les dirigeants hassidiques enfoncent les règlements de zonage, quand ils mettent les politiciens devant le fait accompli et que les entourloupettes font grincer des dents la population locale, qui c’est qu’ils appellent ? Gilbert, bien sûr. C’est tout à fait dans les cordes de celui qui se dit thérapeute conjugal. Et il connait bien la machine à chloroformer les goys.
Gilbert est un chef coq. Dans sa pochette à téfillins, il a toujours sa recette en boîte prête à enfourner. Il n’a qu’à ouvrir les portes d’une synagogue et y convier les goys à venir s’émerveiller. Même pas besoin d’eau. Juste un peu de salive pour enjôler les quelques curieux qui, pour colmater un trou d’une heure d’un dimanche après-midi avec les enfants, sont parfois disposés à gober ses fadaises à la noix de coco cachère.
Gilbert bourre le tiers de la salle d’élus de Projet Montréal et de leurs sympathisants, rameute, à titre de tournebroche, la députée libérale fédérale, sans oublier, bien sûr, ses fameux gâte-sauces, les lobbyistes hassidiques du coin. Et c’est parti !
Pour détendre l’atmosphère, rabbin Gilbert commence toujours par une petite blague insipide. Qu’importe. Ce qui compte c’est qu’il croit vraiment tenir son public captif. Puis pendant une demi-heure, il déballe sa marchandise divine. Des trucs du genre: voici pourquoi on ne rigole pas avec la religion juive.
Depuis le moment où on se lève jusqu’au moment où on s’endort, raconte le rabbin, ça ne dérougit pas. Le pratiquant doit savoir quel pied d’abord poser par terre, comment se laver les mains à la sortie du lit, comment aller aux toilettes, quelle main il peut utiliser, comment il doit s’habiller, manger, etc. Heureusement, il n’y en a que 613 de ces mitsvot dans une journée !
Le 1er mars 2020, par contre, je peux vous assurer que le rabbin Crémisi n’a pas dérapé à peu près pendant son intervention dans la grande salle de prière de la synagogue Amour pour Israël, au coin des rues Durocher et Van Horne.
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Même mis en boîte après le Yom Kippur, le rabbin Crémisi ne donne pas l'impression d'un grand repentant. |
Après son laïus, le bon Gilbert a invité l’assistance à lui poser toutes les questions qu’elle souhaitait. « Allez-y ! Ne soyez pas gênés. Ne soyez pas timides ! J’ai l’habitude de toutes les questions possibles du monde ». Et alors qu’il venait de nous raconter que chez un homme, on peut tout supporter, sauf l’orgueil, il n’a pas su résister pas à un moment de complaisance vaniteuse en lançant comme si de rien n’était : « Je donne des conférences dans 80 pays chaque année. Je suis prêt à tout entendre. » Woe ! Woe !, Capitaine Bonhomme !
À la 72e minute, une femme que je n’ai pas pu identifier dans la salle lui a posé la question qui tue.
« Que pensez-vous de l’éducation des enfants hassidiques ? » Elle faisait allusion au cas de Yohanan Lowen et de son épouse Shifra Wasserstein, le couple qui, après avoir fait défection de la secte hassidique de Boisbriand avec ses quatre enfants, a poursuivi le gouvernement du Québec. Il l’accusait de les avoir abandonnés aux écoles religieuses en ne levant pas le petit doigt pour forcer les sectes ultraorthodoxes à respecter le programme obligatoire du ministère de l’Éducation.
« Je vais vous dire franchement, moi, ce que je pense. Je vais vous le dire. Il faut être franc dans la vie. Désolé. Ce couple-là, ça fait plus d’une décennie qu’ils sont sortis [sic] de la communauté. J’aimerais bien savoir ce qu’ils ont fait pendant dix ans, à part d’être au bien-être social. »
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Chayim Lowen entouré de ses parents qui ont de quoi être très fiers. |
En plein dans les dents, mon Gilbert !
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Le 1er mars 2020, Mindy Pollak était plus qu'honorée de présenter le rabbin Crémisi dans le cadre de ce pur exercice de relations publiques à la synagogue Amour pour Israël. |