dimanche 12 octobre 2014

LA LOI DE LA PÉPINE



Cela faisait des années que l’empire Rosdev laissait à l’abandon des immeubles qu’il possédait juste au nord de l’avenue Van Horne, entre Hutchison et avenue du Parc.

Dès 2008, les inspecteurs d’Outremont avaient constaté que le propriétaire du duplex des 6220-6222 Hutchison avait «détérioré ou laissé détériorer le bâtiment par manque d'entretien, usage abusif ou manoeuvre de dégradation». Le Service de l'aménagement avait alors sommé son richissime propriétaire de remédier à cette situation dans les 30 jours, à défaut de quoi, il «pourrait déposer le dossier d'infraction à la Cour municipale». En bon citoyen corporatif, Rosdev a réagi... six ans après avoir été sommé de bouger.
À l’été 2014, Michael Rosenberg a fait entrer les bulldozers. Bye! Bye! duplex.

Les deux immeubles que Michael Rosenberg a laissé se détériorer.


Juste de l’autre côté de la rue, dans le fief du Plateau, c’est l’imposant édifice industriel du 6240, avenue du Parc qui posait problème. 

Là aussi, ça faisait un bail que Rosenberg négligeait son bien patrimonial. Et il semble qu’il n’ait pas fait grand cas des six avis de non-conformité et des 30 interventions que les inspecteurs du Plateau ont cumulés en moins de deux ans. La seule activité que les citoyens ont pu noter sur les lieux a été l’exploitation d’un terminus d’autobus clandestin.

Michael Rosenberg s’est même permis de jouer avec le conseiller Alex Norris comme un chat s’amuse avec une pelote de laine. 


Le 17 novembre 2011, M. Norris m’a affirmé par écrit s’être plaint directement au président de Rosdev de l’état de délabrement de l’immeuble du 6240 du Parc. Ce dernier lui aurait répondu avoir des difficultés à obtenir un permis pour remplacer les fenêtres de son bâtiment.

Évidemment, la défilade de Rosenberg était grossière. À preuve, le 11 février 2011, soit neuf mois plus tôt, Richard Ryan, conseiller de Projet Montréal pour le Mile-End, nous informait qu’après l’assemblée publique tenue le 27 octobre 2010 spécifiquement sur cette question (voir le document officiel), l’autorisation pour l’installation de fenêtres à l’immeuble de Michael Rosenberg avait déjà été accordée par le conseil d’arrondissement... avec la bénédiction du comité consultatif sur l’urbanisme (CCU).


Aujourd’hui, quatre ans plus tard, ne cherchez pas les belles fenêtres à Rosenberg. Elles brillent par leur absence. Pire. Le 1er octobre dernier, au lieu des vitriers, ce sont les pépines de démolition qui sont débarquées sur les lieux. Que l'immeuble soit patrimoine industriel ou non, Michael Rosenberg a décidé de le raser.

 
1er octobre 2014: le coup d'envoi de la démolition

Le 15 juillet 2014, le directeur de la direction du développement du territoire de l'arrondissement du Plateau, a effectivement octroyé un certificat d'autorisation pour la démolition de l’immense bâtiment.


Il y a quand même un ennui.
 

Un mois avant que ne soit octroyé ce certificat de démolition, les membres du comité consultatif d'urbanisme (CCU) se sont réunis pour discuter de cette demande de démolition. Insatisfaits des rapports d'expertises qui leur ont été remis, ils ont demandé une étude supplémentaire qui leur permettrait de déterminer la valeur [patrimoniale] de l'immeuble. 

Le paragraphe du document dans lequel le CCU requiert un délai pour une étude additionnelle. Pour le document complet, cliquer ICI


La valeur patrimoniale? Non, mais vous voulez rire! Pensez-vous vraiment que les demandeurs ont du temps à perdre avec un «caprice» du CCU? L'immeuble pouvait bien être laissé à l'abandon pendant des années. Les autorités municipales pouvaient bien sécher. Mais quand le propriétaire veut démolir, là, faut pas que ça niaise. Quitte à bafouer la requête du CCU. 

Comment? Vous pensez que quelqu'un a fait pression sur les fonctionnaires? Non, mais... vous vous rendez compte de ce que vous dites?

Du béton et de l'acier. Et on doit croire sur parole que cet immeuble était en si mauvais état qu'il fallait le le démolir à la vitesse grand V?

6 commentaires:

Anne Little a dit…

Plus ça va, plus c'est pareil.

Luc Forest a dit…

C'est vrai que pour changer une porte ou des fenêtres sur le chic Platôôôt c'est bien compliqué et qu'il faut attendre les directives et autorisations du Vatican qui décide quelle porte et quelle fenêtre vous pouvez mettre et ce même si plusieurs maisons ont comme porte de façade, une belle porte en aluminium avec un flamant rose dessus ou encore des portes cheap qui servent pour l'arrière. Ne démolit pas ce qu'il veut non plus sur le Platôôôt. La moindre boîte à soulier infestée de moisissures et aux poutres pourries est considérée au même titre qu'une maison de $10 millions située au Summit Circle. Je comprends dons que n'ayant pu satisfaire les exigences du Vatican, ou de Jérusalem, on ait décidé de démolir le bâtiment. La ville dans cette histoire n'a fait que jouer le rôle de la vierge offensée pour s'opposer à la dernière minute à la démolition du dit bâtiment. Les dés étaient pipés d'avance de toute évidence.

Jean Décarie a dit…

J'ai vu les pépines vendredi, c'est une honte! De toute évidence, la structure de cet édifice était en bon état. Et son importance lui conférait d'emblée une valeur de patrimoine industriel. Il aurait pu être converti en divers usages commerciaux, résidentiels, communautaires, commerciaux ou même industriels - voir Ubisoft px .
Sait-on au moins quel type de développement Rosdev veut faire de cet immense terrain?

Anne McLaughlin a dit…

Est-ce que cet édifice n'était pas encore à louer à peine quelques jours avant d'être démoli?

Pierre Lacerte a dit…

@ Mme McLaughlin: Non, l'immeuble était vacant depuis des années. Ce qui a pu vous faire penser que le bâtiment était à louer, c'est probablement la grande pancarte fixée sur l'immeuble et qui invitait les locataires potentiels à contacter Rosdev.

Catherine Tremblay a dit…

Je me disais aussi que c'était bizarre de le démolir. La structure était sûrement encore bonne.