Personne ne reprochera au professeur Anctil de s’intéresser à l’histoire de la communauté hassidique établie au Québec depuis le début du 20e siècle ou d’avoir traduit du yiddish les souvenirs d’Israël Medresh, jeune Juif d’Europe de l’Est débarqué à Montréal en 1916. Au contraire, il est fort instructif de découvrir et de comprendre les rapports entre la communauté juive et les Québécois francophones depuis leurs premiers contacts.
Par contre, quand sa fascination pour la secte hassidique se transforme en un serment d’allégeance inconditionnel qui l’amène à justifier le jusqu’au-boutisme fanatique, rien ne va plus.
Il est important de comprendre les motivations profondes qui ont amené les hassidim à se replier sur eux-mêmes, à vivre en reclus au milieu d’une société qu’ils abhorrent ouvertement. Les raisons historiques évoquées par M. Anctil sont extrêmement dramatiques, mais pendant combien de siècles encore les sociétés occidentales devront-elles battre la coulpe et faire amende honorable? Il n’y a aucune raison pour la société d’accueil de se plier aux préceptes ultra religieux de cette frange intégriste de la communauté juive. La démocratie ne peut céder à la théocratie d’une minorité sans bafouer les droits de tous, y compris les droits des enfants que sont les petits hassidim.
Que les dirigeants des sectes hassidiques soient ou non motivés par un isolationnisme malveillant ou par un mépris des lois du pays comme le réfute M. Anctil, il n’en demeure pas moins que des ultra religieux influents font clairement fi des lois et règlements qui s’appliquent à toutes les autres communautés, qu’elles soient de souche ou non. Doit-on tolérer l’intolérable? Peut-on leur permettre de créer leur propre système d'apartheid avec la complicité de certains élus alors que nous décrions et sanctionnons l’abject phénomène partout ailleurs sur la planète?
En matière de scolarisation, Pierre Anctil avance que les rabbins hassidiques ne rejettent pas les exigences officielles. L’excuse pour ne pas se conformer résiderait dans le fait qu’une fois le rigoureux programme judaïque injecté dans le cerveau de leurs jeunes, il ne reste plus suffisamment de temps pour le superflu académique exigé par le ministère. C’est vrai que même pour les pieux hommes, il n’y a que 24 heures dans une journée!
M. Anctil met en garde la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne. Il insinue qu'elle perd son temps à négocier avec les rabbins un contrat qui les engageraient à respecter le cursus du ministère, incluant le cours d'éthique et de culture religieuse. Ce dernier cours violerait, supposément, la liberté de conscience des juifs de confession hassidique. Mais que faites-vous, M. Anctil, du droit à l'éducation et à devenir un citoyen éclairé à part entière qui ne vive pas aux crochets de la société qui l'accueille et lui offre les subventions à l'éducation? Avez-vous lu le rapport annuel 2008 de la Banque d'Israël qui révèle que seuls 32% des hommes de la communauté ultra orthodoxe israélienne disposaient d'un emploi en 2007? Chez nous, le pourcentage de ces hommes en noir sur le marché du travail équivaudrait à celui de nos...décrocheurs! Que cela nous vaudra-t-il dans quelques années? Tension, crises, confrontations sanglantes avec policiers et manifestants blessés comme cela se vit régulièrement en Israël entre juifs laïcs et fanatiques religieux? Lisez cet article des derniers jours sur la manifestation religieuse de la communauté ultra-orthodoxe contre l'ouverture d'un stationnement municipal de Jérusalem le jour du Shabbat. Pendant combien de temps encore, M. Anctil, endosserez-vous béatement les conséquences de cette redoutable réalité appréhendée?
S'il faut une bataille juridique, que les autorités ne s'en laissent pas imposer car si certains dirigeants hassidiques n'ont cure de respecter nos lois, ils les utilisent à souhait pour atteindre leurs fins. Ce n'est qu'en abdiquant devant les intégristes que nous perdrons vraisemblablement tous, collectivement.
Le 6 juin dernier, des heurts ont opposé à Jérusalem des milliers de juifs orthodoxes à des policiers israéliens.
Des manifestants ont lancé des pierres, des bouteilles vides et des couches souillées vers les forces de l'ordre aux cris de "Shabbat".
2 commentaires:
Bonjour Monsieur,
Vous écrivez:
« En matière de scolarisation, Pierre Anctil avance que les rabbins hassidiques ne rejettent pas les exigences officielles. L'excuse pour ne pas se conformer résiderait dans le fait qu'une fois le rigoureux programme judaïque injecté dans le cerveau de leurs jeunes, il ne reste plus suffisamment de temps dans la journée pour le superflu théorique exigé par le ministère. C'est vrai que même pour les pieux hommes, les journées n'ont que 24 heures! »
Hélas, Monsieur! Même si on trouvait le moyen d'ajouter des heures aux journées, cela n'y changerait rien du tout, voyez un peu:
Dans la Guemara Mena'hot 99b:
Ben Dama, le neveu de Rabbi Ishmaël, demanda un jour à son oncle :
- « Moi qui a étudié toute la Torah, ai-je le droit maintenant d'étudier les sciences grecques ? »
Rabbi Ishmaël lui répondit :
- Si tu trouves pour te livrer à cette étude une heure qui ne fait partie ni du jour, ni de la nuit, alors consacre-la à l'étude des sciences grecques. Car il est écrit: ce livre de la Torah ne quittera pas ta bouche, et tu l'étudieras jour et nuit.
Et aussi :
[...] Ce qu'il y a de certain, c'est qu'à Jérusalem le grec était très peu étudié, que les études grecques étaient considérées comme dangereuses et même serviles, qu'on les déclarait bonnes tout au plus pour les femmes en guise de parure. L'étude seule de la Loi passait pour libérale et digne d'un homme sérieux. Interrogé sur le moment où il convenait d'enseigner aux enfants «la sagesse grecque» un savant rabbin avait répondu : «À l'heure qui n'est ni le jour ni la nuit, puisqu'il est écrit de la Loi : Tu l'étudieras jour et nuit.»
Talmud de Jérusalem, Péah, I, 1 ; Talmud de Babylone, Menachoth, 99 b.
Keep up the good work!
Sources:
http://www.juif.org/blogs/11640,a-t-on-le-droit-d-etudier-la-torah-la-nuit-du-24-et-la-journee-du-25.php
http://www.lexilogos.com/document/renan/vie_jesus_3.htm
J'ai lu dans Le Devoir du 17 juin 2009 l'article de M. Pierre Lacerte intitulé Éducation: tolérer l'intolérable? J'ai aussi pris connaissance du mémoire qu'il avait présenté à la commission Bouchard-Taylor en novembre 2007. Il m'apparaît évident,voire impératif que nos dirigeants ( élus ) fassent appliquer à tous les lois de ce pays avant que ne survienne un déséquilibre difficile à réparer. Aucune communauté ne devrait pouvoir jouir de passe-droit, qu'elle soit de souche ou non.
Quant à M. Antil, qu'il sache que la seule façon de grandir est de donner libre cours à notre pensée. Il est essentiel que chacun puisse se questionner sur ses agissements et remettre en cause ses convictions!
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