jeudi 3 juillet 2014

LE VISAGE DE LA MALTRAITANCE


Lorsque les médias ont étalé au grand jour la saga de la secte Lev Tahor de Sainte-Agathe, l’image des ultraorthodoxes en a encore pris un coup.

Plusieurs reportages dévastateurs nous ont montré des adolescentes parfois soumises à des mariages arrangés, des enfants négligés, généralement privés d’une éducation digne de ce nom et vivant dans des maisons pouvant être insalubres. Au point où les services de la protection de la jeunesse ont dû intervenir et décidé de retirer à certains parents la garde de leurs enfants. La saga a pris une tournure dramatique lorsque les membres de la secte, pris de panique, ont décidé de fuir le Québec en pleine nuit pour aller se réfugier en Ontario.

  
Dans le but probable de contrôler les dommages collatéraux, le rabbin orthodoxe
Le rabbin Reuben Poupko à l'émission The Fifth Estate
Reuben Poupko de Côte-Saint-Luc s’est montré en parfaite symbiose avec Frank Dimant, le leader de B'nai B'rith Canada.

Comme Dimant, Poupko semble vouloir faire en sorte que la mauvaise réputation médiatique causée par la secte Lev Tahor ne vienne pas entacher celle des autres communautés ultraorthodoxes.


Pour saper la légitimité des Lev Tahor, le rabbin de Côte-Saint-Luc raconte (visionner le court extrait) que ce que vivent les adeptes de cette secte n'est pas authentiquement juif. «A cult is a very comforting bubble. All questions are answered, all decisions are handed over and you have this exhalted vision of your own destiny...»

Quelle coïncidence! Sa description des adeptes de la secte Lev Tahor se conjugue parfaitement avec le pouvoir des rebbe ultraorthodoxes que donne Lise Ravary à la page 62 de son bouquin Ma vie chez les juifs hassidiques: «Un rebbe... c’est ainsi qu’on appelle le dirigeant d’un groupe hassidique dont il est le maître absolu et incontesté. Il est traité comme un monarque par sa communauté, et ses disciples forment en quelque sorte sa cour. Les membres de la communauté le consultent pour toutes les décisions importantes de leur vie : mariage, emploi, investissement, etc.» Bref, c'est le gourou qui prend en charge ses sujets.

C’est intéressant d’entendre Poupko tenter de séparer le bon grain de l’ivraie. D’autant plus que le 10 mars dernier, j’ai reçu l’appel inattendu de Mendy Marcus, un jeune homme qui a réussi, non sans peine, à s’extirper de la mouvance hassidique.

Mendy Marcus en ma compagnie en mars 2014
 Nous nous sommes donné rendez-vous dans un café d’Outremont où Mendy m’a raconté à bâtons rompus la triste jeunesse qu’il a vécue non seulement chez les Lev Tahor de Sainte-Agathe, mais aussi chez les Tash de Boisbriand et les Satmar d’Outremont.

Né à Londres (GB), dans une famille ultraorthodoxe extrêmement religieuse, Mendy Marcus a suivi ses parents jusqu’à Monroe (NY) avec ses sept sœurs et quatre frères avant de se retrouver à Boisbriand à l’âge de six ans.

Victimes de la violence de leur père, Mendy et ses frères et sœurs ont été placés dans des familles d’accueil hassidiques. «J’ai passé quatre ans dans une école religieuse de Boisbriand. Je n’ai eu aucune éducation séculière. Je ne maîtrisais même pas bien l’anglais.»  

Mendy Marcus, un adolescent brimé
À 11 ans, sur la recommandation du travailleur social chargé de son cas, lui et un de ses frères sont remis aux «bons soins» de la secte Lev Tahor. Une expérience qu’il n’a pas particulièrement appréciée. (voir le court extrait vidéo). Pas plus, d’ailleurs, que les années qu’il a passées sous l’emprise de la secte Tash de Boisbriand où dans une école satmar de la rue Bates, à Outremont. «Les Satmar et les Tash, sont des sectes au même titre que les Lev Tahor, soutient Mendy. Ils nous forcent tous à croire sans nous permettre de penser.» Chez les Tash, par exemple, Mendy se rappelle que s’il avait le malheur de poser des questions à ses professeurs, on le frappait en lui reprochant de douter de Dieu. «C’est du lavage de cerveau à 100 %!»

Aujourd’hui, Mendy Marcus a renoncé à extirper son frère de la secte Lev Tahor. «Il est totalement fanatisé.» En revanche, il aimerait pouvoir venir en aide à ceux et celles qui souhaiteraient s’affranchir des sectes ultraorthodoxes. Il mijote d’écrire un livre sur cette triste réalité qui handicape des milliers de jeunes comme lui. 

Une chose est certaine. Ce n’est pas lui qui contredira la ministre responsable de la Protection de la jeunesse, Lucie Charlebois, qui a récemment assimilé la fréquentation de ces écoles illégales à de la maltraitance.

4 commentaires:

Nicole-Patricia Roy a dit…

Je croyais que le cas de Lev Tahor était unique, l'histoire de Mendy Marcus nous apprend que cela existe ailleurs au Québec. C'est triste pour tous ces enfants qui subissent un lavage de cerveau. J'espère que Mendy pourra poursuivre une vie qui lui appartiendra entièrement.

Roland Carrier a dit…

Vous faites un travail remarquable en projetant factuellement les effets du rigorisme religieux. Il en est de même des préceptes du Coran, mais appliqués autrement. Et les femmes et les enfants, soumis à la loi du mâle, écopent des effets et de l'application de règles nées et figées dans le temps.

Il faut appliquer dans toute sa rigueur notre loi que ces sectes combattent sur le terrain politique en contribuant généreusement aux partis qui tolèrent l'intolérable. Qui veut vivre aux côtés d'un voisin qui enfreint les règlements municipaux tout en méprisant notre culture et nos valeurs?

Unknown a dit…

oui curieux que mandy vous appelle

Pierre Lacerte a dit…

Oui, Mme Craig, j'ai été surpris par son appel. Il est vrai, cependant, qu'au cours des sept dernières années, mon blogue a fait passablement de bruit dans le milieu hassidique. Je ne saurais vous dire qui l'a mis sur ma piste.