jeudi 5 décembre 2013

LA CRUCIFIXION DES LARRONS

Je n'y croyais presque plus. Après une rocambolesque saga de six ans bien sonnés, le deuxième jugement que j'attendais depuis près de 11 mois est finalement tombé hier en fin de journée. Il m'est arrivé par courriel sous la forme d'un PDF de 108 pages expédié par mes deux super avocates Rosalia Giarratano et Hila Huelsen.

Avez-vous une petite idée de ce que j'ai fait jusqu'au petit matin? Eh! Oui, j'ai épluché ligne après ligne le jugement numéro 500-17-045603-084. Je vous mentirais si je vous disais que je n'avais pas de papillons dans le ventre. 

Quand on se retrouve devant les tribunaux, on sait quand ça commence, mais on n'a aucune idée de quand et comment ça se termine. Qu'importe que vous soyez certain de votre bon droit et que vous ayez fait tous vos devoirs, il est presque impossible de prévoir tous les coups et de colmater toutes les brèches. Une fois qu'on a la main dans l'engrenage, à moins d'accepter de se faire arracher un bras, on ne peut pas reculer. Il faut suivre le rythme de l'appareil judiciaire. Pour le meilleur et pour le... prix.

C'est ce que j'ai choisi de faire dans la deuxième cause qui m'a opposé à Michael Rosenberg, Martin Rosenberg et Alex Werzberger. Cette fois, flanqués de l'inénarrable Julius Grey, les trois puissants nababs hassidiques m'ont sauté à la gorge en m'accusant de les avoir diffamés et d'avoir porté atteinte à leur si belle réputation.

En octobre 2007, j'avais eu le malheur de dénoncer leur comportement délinquant
lors d'une assemblée du conseil d'arrondissement d'Outremont. Dans un premier temps, je leur reprochais de se stationner constamment et pendant de longues périodes au beau milieu de la rue devant chez moi, sans considération du danger qu'ils faisaient courir aux automobilistes et aux résidents. Plus grave encore, j'ai déploré le fait que les Rosenberg père et fils étaient passés maîtres dans l'art d'entreprendre des rénovations sauvages et sans permis dans leur synagogue et de se moquer des fermetures de chantier exigées par les inspecteurs municipaux. Il y a même eu tentative de corruption de fonctionnaires.


Croyez-moi, la lutte a été assez épique, merci. Il m'aura fallu des mois et des mois à fourbir mes armes avant de sauter dans l'arène de la cour Supérieure pour mener ce combat extrême qui a duré cinq longues journées, en janvier 2013.

Cette saga m'aura fait perdre quelques centaines de milliers de dollars, mais pour faire entendre raison à des ploutocrates qui se prennent pour des empereurs, il faut ce qu'il faut, n'est-ce pas?

En dépit de tout ce qu'ils m'ont fait endurer, je peux dire aujourd'hui que justice vient d'être rendu. Et bien rendue, même, puisque c'est un important débat de société qui vient de se jouer.

L'honorable juge Claude Dallaire vient de retourner comme une crêpe mes trois poursuivants. Non seulement conclut-elle que mes propos ne portent nullement atteinte à leurs droits fondamentaux, mais elle affirme que je suis pleinement justifié de les diffuser sur mon blogue au nom du droit du public à l'information.


La juge Dallaire estime, entre autres, que le contenu de mes 300 et quelques chroniques est socialement utile, que ma démarche d'enquête est diligente, que mes sources d'information sont valables puisqu'elles reposent sur des observations de première main, sur des documents provenant de sources gouvernementales, sur des articles de la presse écrite ou des reportages diffusés dans les médias. Bref, l'honorable juge de la cour Supérieure n'a rien acheté des prétentions de mes trois adversaires. Mes propos ne sont ni haineux, ni dégradants, ni humiliants, ni offensants. En revanche, je ne compte plus les fois où la crédibilité de nos trois larrons a été sérieusement mise à mal. C'était triste à voir.
La détresse de Marie en apprenant le verdict
Vous voulez savoir comment j'ai fait pour éviter les nombreux écueils au fil de toutes ces années à titre de blogueur? C'est simple. J'ai suivi à la lettre les conseils que ce bon Julius Grey dispensait dans ses chroniques du Journal de Montréal. Merci, Julio! Je t'en dois une.
 
Je vous laisse prendre connaissance du jugement (que j'ai surligné pour les plus pressés). J'y reviendrai après l'avoir complètement digéré.

9 commentaires:

Anonyme a dit…

enfin justice a été rendue.
félicitations !
mais attention! Vos adversaires dans cette poursuite sont riches et puissants.
Lâchez pas !

Anonyme a dit…

Quin toé - comme y disent.
Bravo Pierre.

Bernard Cooper a dit…

Il a été crucifié pour les péchés et le salut de Marie Cinq-Mars et de la classe politique. On a hâte d'entendre ses dernières paroles: mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné?

Danielle Guy a dit…

Vous avez toute mon admiration pour le courageux combat que vous avez mené pour permettre à la population d'Outremont de vivre avec le sentiment que justice est rendue. J'ai quitté votre secteur depuis quelques années, mais je n'oublierai pas tous les passe-droits inadmissibles que l'administration a accordé à ces citoyens délinquants... À cause d'eux, un si beau quartier est en train de se dégrader...
J'espère que votre courage servira d'exemple à d'autres citoyens et aussi à l'administration actuelle...
Mes plus sincères félicitations pour vos actions.

Alain Tremblay a dit…

Probabilité d'un appel : élevée.

Alain Tremblay a dit…

[472] Chaque partie payant ses frais, compte tenu des circonstances.
Comme le mentionnait l’honorable Roy McMurty "It's only the relatively affluent in society, for the most part, who can afford to go through a trial." Voir: http://www.thestar.com/news/2007/03/03/the_dark_side_of_justice.html. J'aurais dû utiliser le mot appel au pluriel puisque cette décision fera l'objet d'appels successifs. Me Grey fut l'avocat représentant les défendeurs dans Kanavaros c. Artinian, 2013 QCCS 1086 (voir: http://canlii.org/fr/qc/qccs/doc/2013/2013qccs1086/2013qccs1086.html) qui fut porté en appel jusqu'en Cour suprême. Les frais judiciaires et extrajudiciaires furent, on s'en doute. élevés. Qu'en est-il des frais de votre saga judiciaire en cour supérieure ? Qu’en sera-t-il lors des appels ?

Pierre Lacerte a dit…

Hélas! Monsieur Tremblay, l'honorable Roy McMurty a tout à fait raison. Il n'y a pratiquement que les riches qui peuvent vraiment se permettre de se rendre jusqu'au bout d'un procès.

Dans le cas qui m'occupe, les Rosenberg et Werzberger sont infiniment plus privilégiés que moi. Au cours des six dernières années, alors qu'ils ont pu vaquer tranquillement à leurs occupations lucratives, moi, j'ai dû ramer comme un marathonien. Contrairement à mes poursuivants, tous les aspects de ma vie ont été bouleversés. J'ai payé personnellement, professionnellement et financièrement le refus de me laisser intimider par ces « tycoons » peu scrupuleux.

Michael Rosenberg et Alex Werzberger peuvent décider d'interjeter appel du jugement qui m'a donné raison. Ils ont 30 jours pour le faire et je peux vous dire que dans leur cas, Money is no object. Pour eux, un petit 100 000 $, c'est moins que la petite monnaie que j'ai dans le fond de mes poches.

Vous me demandez ce qu'il en sera des frais judiciaires s'ils en appellent ? Poser la question, c'est y répondre. Chaque partie paiera ses frais!

Martin Drapeau a dit…

Monsieur Lacerte,

J'ai lu avec un grand intérêt l'article sur votre victoire paru dans La Presse de samedi dernier.

Je suis, en partie par hasard, le premier à avoir obtenu gain de cause contre une poursuite bâillon (Construction Infrabec c. Martin Drapeau). Ces dispositions législatives contre ce genre d'abus de droit ont changé ma vie et je suis heureux de voir qu'elles continuent à le faire pour d'autres personnes. Et votre victoire va perpétrer cette lancée!

Pierre Lacerte a dit…

À l'anonyme qui souhaite placer un commentaire commençant par :"Vous avez gagné ce procès, réjouissez vous.
Gardez tout de même un regard dans le rétroviseur...", j'aimerais que vous me révéliez votre identité.

Merci d'avance